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FC Nantes – EXCLU Wiertelak présente l’entraînement 2.0 des Canaris
De la gélule connectée à la cryothérapie en passant par les balises GPS : aujourd’hui, les joueurs du FC Nantes sont plongés dans une révolution technologique au service de la performance.
De la gélule connectée à la cryothérapie en passant par les balises GPS : aujourd'hui, les joueurs du FC Nantes sont plongés dans une révolution technologique au service de la performance. Second volet de notre dossier sur les techniques d’entraà®nement des Canaris avec l’interview du préparateur physique Stéphane Wiertelak.
But! Nantes : Stéphane, lors des matches face à Rennes puis le PSG, en septembre, une dizaine de joueurs a ingéré des gélules connectées. A quoi à§a sert ?Stéphane Wiertelak : C'est plus la volonté d'éclaircir les effets des bains froids, savoir ce que à§a apporte, savoir ce qui se passe pendant le match en terme de températures”¦
à‡a vous sert dans votre travail ?Aujourd'hui, c'est en phase d'exploration. C'est intéressant de chiffrer les choses, de voir les températures, les différences individuelles. Ce sont les premiers temps de l'exploration scientifique, il n'y a pas de protocole carré mais à§a permet de réfléchir, d'étudier et d'organiser les choses pour avoir des retours tangibles, de tester d'autres choses.
“Ce serait une grave erreur de réduire la performance footballistique à la performance physique.”
C'est une approche très scientifique du football !Mais à§a l'a toujours été ! Au niveau scientifique, on réfléchit màªme à des textiles connectés. On va enlever tous les cardio fréquencemètres et les GPS. Ces petits boà®tiers qui sont très confortables mais dont on pourrait se passer car ils pourront àªtre insérés dans les fibres des maillots”¦
En attendant, il y a donc cette fameuse gélule, qu'on fait avaler aux joueurs, c'est une démarche différente !Oui, mais c'est quelque chose qu'on va voir sur la durée, pour voir la température du joueur. C'est très confortable, le joueur avale un petit cachet et il y a un petit boà®tier à côté qui enregistre”¦ Il y a beaucoup de choses qui se passent autour de l'étude des effets physiologiques et physiques dans le sport. Ce n'est pas du flicage, attention !
Ce qui vous sert davantage, c'est donc le GPS ?En termes de préparation physique, oui, le GPS est une vraie révolution. Le président Kita a acheté ce système quand je suis arrivé au club, il y a 5 ans. à‡a renseigne sur les courses, les sprints, les blocages”¦ Après, qu'on obtienne ces données grâce à un boà®tier télémétrique au bord du terrain ou dans des fibres, à§a ne changera rien.
Désormais, le GPS est aussi utilisé en match, alors qu'avant, ce n'était qu'aux entraà®nements”¦Oui, c'était interdit, mais la FIFA l'a utilisé cet été. Avant, on en avait cinq qu'on mettait sur des joueurs pour avoir des retours sur l'impact de nos séances. Aujourd'hui, on a un GPS pour chacun en match et on mesure l'implication individuelle.
à‡a vous demande plus de travail ?Oui, et c'est pour à§a que Julien Le Pape est venu travailler avec moi cet été. Car compiler des données mais ne pas avoir le temps de les analyser, à§a ne sert à rien.
N'est-ce pas paradoxal d'analyser des données individuelles dans un sport collectif ?Justement, il ne faut pas confondre la performance athlétique et la performance footballistique. Cette dernière est complexe. Il y a évidemment les données physiques qui entrent en interaction, mais ce serait une grave erreur de réduire la performance footballistique à la performance physique. Ce n'est qu'une petite partie, qui reste certes importantes.
Pourriez-vous vous passer des GPS aujourd'hui ?C'est un investissement important mais on peut toujours s'en passer ! Comme les cardio-fréquencemètres, qui avaient été une révolution. Tout à coup, on a dit aux joueurs : “Toi, tu cours à 12, toi à 14 pour avoir le màªme impact”. C'est différent que de partir tous ensemble pour faire la màªme chose.
“On n'est pas dans un entraà®nement avec des pipettes ou autre, on est sur un terrain de foot !”
Autre méthode de plus en plus répandue : la cryothérapie”¦C'est un outil très intéressant, un vrai plus, que Philippe Daguillon (ndlr : le kiné) utilise depuis une dizaine d'années. Mais pour moi, ce n'est pas une révolution car ce n'est pas vraiment quelque chose qui ouvre d'autres horizons. On l'utilise après les matches, les entraà®nements. C'est venu par le rugby où il y a beaucoup de micro-impacts. Le froid permet de faire bien circuler le sang et de stopper toutes les micro-hémorragies.
Avant, c'était des poubelles remplies de glaà§ons !Oui, et l'idée a fait son chemin pour mettre quelque chose d'un peu plus carré, plus hygiénique.
La gélule peut justement vous servir à étudier les effets de la cryothérapie ?Oui, pour voir l'impact de la cryothérapie ou le fait de prendre une douche froide à la mi-temps. Tout à§a est en phase d'exploration. On a un protocole précis avec la cryothérapie : le joueur reste une minute dedans, puis marche un peu pour créer un choc thermique et y retourne. Mais peut-àªtre faut-il y rester deux minutes dedans avant de ressortir, ou faire tout d'un bloc”¦ C'est à§a qu'il faut explorer, mais en les croisant sur les performances.
Le FC Nantes est-il à la pointe de ce genre de tests ?à‡a va se faire à l'INSEP (ndlr : institut national du sport, de l'expertise et de la performance). C'est assez compliqué à faire avec des sportifs de haut niveau car on est d'abord là pour gagner des matches et non pour faire des tests mais l'idée est là . On essaie de mettre en corrélation les données des GPS avec les températures. Mais il faut le répéter peut-àªtre dix, vingt ou trente fois avant de commencer à ébaucher des conclusions.
La finalité, c'est de faire un joueur scientifiquement parfait ?Non, mais de bien savoir ce qu'on fait, ce qu'il se passe dans la performance, de mieux connaà®tre les choses pour les ajuster. On n'est pas dans un entraà®nement avec des pipettes ou autre, on est sur un terrain de foot ! Mais dans les laboratoires à l'INSEP, ils font en effet des explorations pointues, avec des conclusions scientifiques que les entraà®neurs saisissent pour adapter ce qu'ils font sur le terrain. Il y a un temps pour l'étude scientifique et un temps pour àªtre sur le terrain où on vulgarise un peu. Tous ces outils vont nous permettre de préciser les choses, d'encadrer, de se rapprocher des performances mais on n'est pas dans un laboratoire quand màªme. Il faut bien rester à sa place.
À l’AC Milan, à§a fait longtemps qu'ils développent une approche très scientifique du football !Oui, et c'est màªme mieux ! J'ai visité Milanello (ndlr : centre d'entraà®nement du club lombard) et dans les sous-sols, ils ont une chambre noire où ils mettent des capteurs sur les recrues. Ils les font courir sur des tapis pour analyser la course du joueur, la modéliser. A-t-il un temps de contact au sol identique sur les deux appuis ? Quand il accélère, pousse-t-il symétriquement ? Est-il bien équilibré lors d'une frappe dans le ballon ? à‡a, c'est un temps scientifique. Ils ressortent les données du joueur et constatent s'il a une faiblesse dans une course. Le doc regarde pour voir s'il y a un souci à une cheville ou un petit déficit aux ischio par exemple. Le travail est ensuite adapté en fonction. C'est ce qu'on fait aussi ici. Pour un joueur qui a eu des blessures à répétition, on renforce spécifiquement avec le kiné. Bon, à Milan, c'est un peu poussé à l'extràªme. Après, quand ils font des jeux collectifs, à§a reste des jeux ! On connaà®t mieux l'athlète et on oriente le travail durant une séance de musculation.
Propos recueillis par Charles GUYARD
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