Droits TV : DAZN, al-Khelaïfi, Canal+, avenir de la L1… Labrune vide son sac !
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Par
Bastien Aubert
Longuement interrogé dans les colonnes de L’Équipe, Vincent Labrune a mis les choses au clair au sujet des droits télé. Tout y passe : DAZN, Nasser al-Khelaïfi, Canal+ ainsi que l’avenir de la L1… Morceaux choisis :
Quelles sont les prochaines étapes avec DAZN ?
« Pour faire face à cette situation exceptionnelle, le conseil d’administration de la LFP avait décidé à l’unanimité d’activer son fonds de réserve. Ce dispositif d’urgence, qui avait été mis en place grâce à l’accord avec CVC (le fonds qui a injecté 1,5 milliard d’euros), avait permis aux clubs de Ligue 1 de faire face à leurs besoins de trésorerie de court terme. Il faut regarder devant nous car les clubs, les spectateurs et, plus globalement, les amoureux du football français ont un intérêt commun : que DAZN performe et gagne de nouveaux abonnés. Nous avons deux objectifs. Le premier, renforcer la lutte contre le piratage. Il y a en effet urgence à agir de la part du législateur, car la France a des années de retard par rapport à ses voisins européens. Je suis ravi de voir que la proposition de loi portée par le sénateur Savin est en cours de finalisation et je me réjouis qu’elle soit officiellement soutenue par Marie Barsacq (ministre des Sports) et par Rachida Dati (ministre de la Culture), que j’ai d’ailleurs vue mardi sur ce sujet. Le deuxième objectif est d’ouvrir encore plus nos clubs à DAZN et en faire encore davantage la promotion, notamment auprès des plus jeunes. »
Labrune est-il le cabot d’al-Khelaïfi ?
« Remercier des gens qui participent à notre économie, ce n’est pas être soumis. Je ne suis pas inféodé à Nasser al-Khelaïfi. Cette idée, totalement fausse, n’est bâtie sur rien et elle est totalement diffamatoire. D’ailleurs, je porterai plainte contre certaines banderoles placées dans le stade de l’OL, dimanche dernier, qui font état de “corruption” de ma part par Nasser al-Khelaïfi. C’est absolument scandaleux, pour ne pas dire plus. Je remercie logiquement ceux qui donnent l’argent. Je suis bien éduqué. Après, les reproches que l’on me fait sur mes liens avec Nasser et le Qatar sont absolument incompréhensibles. De quoi parle-t-on ? On parle de calomnies et de fantasmes. Je rappelle que Nasser al-Khelaïfi ne m’a pas soutenu quand j’étais candidat à la présidence de la Ligue, en 2020, et que c’est moi qui ai mis fin, en 2023, au contrat de commercialisation de beIN concernant les droits télé internationaux qu’ils avaient depuis près de dix ans. C’est un fait. Et un autre fait, c’est que le Qatar, qu’on le veuille ou non, est un investisseur majeur dans le football français depuis quatorze ans. Sur le sujet des droits télé, même si certains sont déçus, et j’en fais partie, beIN participe à hauteur de 210 millions d’euros dans un marché particulièrement atone. Par ailleurs, ils ne sont pas obligés de donner 40 millions d’euros sur la L2 alors qu’ils sont les seuls candidats. »
Où sont les 20 M€ de sponsoring du Qatar ?
« Ils sont très durs à mettre en place, parce qu’il y a 36 clubs avec 36 problématiques et des conflits potentiels avec les marques du Qatar. Mais mettez-vous à leur place. Quand on fait du sponsoring, c’est pour avoir une image positive. Et à la seconde où ils ont annoncé ces 20 millions d’euros de sponsoring, il s’est mis en place une campagne hallucinante de déferlement médiatique contre la Qatar et contre beIN. Cela n’a pas permis d’accélérer les négociations à leur niveau. On a remis les choses en place. Il y a 5 clubs en L1 et 4 en L2 pour lesquels on n’a pas encore trouvé de solution. On espère y parvenir. Je rencontre Youssef al-Obaidly (président de beIN Sports France) la semaine prochaine pour mettre un point final, je l’espère, à ce sujet pour que l’ensemble des clubs puissent bénéficier de ce contrat de sponsoring. Mais certains clubs qui se plaignent doivent aussi arrêter de jouer aux pompiers pyromanes. On ne peut pas orchestrer une campagne contre le Qatar et s’étonner que cela complique les choses. »
Quel avenir pour le football français ?
« On doit utiliser le temps qui reste avant cette échéance pour réfléchir au modèle économique que nous voulons pour le football français. Si on en est là, c’est parce que la LFP a fait le choix de Mediapro au détriment de Canal+. Les anciens dirigeants de la Ligue ont scellé le divorce avec le diffuseur historique qui est en situation de quasi-monopole. On en paye encore les pots cassés aujourd’hui. Depuis 2020, on n’a géré que des crises : depuis que l’on est fâchés avec Canal+, tous nos partenaires, que ce soient Mediapro, Amazon ou DAZN, ont rencontré des difficultés. Si DAZN est un succès, on espère continuer avec eux. Pour autant, on doit ouvrir des pistes de réflexion. Est-ce que l’on doit faire notre chaîne ? Est-ce que l’on doit la faire avec un partenaire ? Toutes les portes sont ouvertes. »
Quelle place pour Canal+ ?
« Comme tous les acteurs du foot, je déplore le refus de Canal+ de participer à nos derniers appels d’offres. Personnellement, j’ai tout essayé pour les mettre autour de la table. C’était d’ailleurs aussi le sens des longues discussions avec beIN, car quand on discute avec beIN, par définition, on discute indirectement avec Canal+, qui les distribue en exclusivité. Si demain, Canal+ souhaite diffuser la L1 à sa juste valeur, ils seront évidemment les bienvenus. Mais aujourd’hui, ils n’ont pas souhaité le faire et on ne peut pas les forcer. Sans trahir de secret, j’ai fait passer le message à Canal+, dès le mois de mai dernier, que si c’était moi le problème, j’étais prêt à me retirer pour favoriser leur arrivée au juste prix. Ce n’est pas le retour que j’ai eu. En aucun cas, je ne dois être un frein à quoi que ce soit. Je suis guidé par l’intérêt général et pas par mon cas personnel. »
Entretien à retrouver dans les colonnes de L’Equipe.