Pascal Dupraz l’avait martelé lors de son point presse, deux jours avant. Même vingtième de son championnat, l’ASSE est une équipe de Ligue 1, et Bergerac, même auteur d’un exploit face à Metz, n’est qu’une formation de National 2. Mais parce qu’il lui est arrivé de bouleverser la hiérarchie en d’autres temps, il devait bien se méfier un peu, preuve cet avertissement « Il n’y a pas de crainte à avoir mais il faudra une extrême vigilance ». Raté, comme son rêve de s’assoir à nouveau sur le banc au stade de France, du moins pour cette année « J’y suis déjà allé (avec Évian-Thonon-Gaillard) et j’y retournerais bien » . Dans la même phrase, il relevait aussi « Je ne suis pas gavé de résultats » et il l’est encore moins depuis son arrivée à Saint-Étienne, constat amer de son déplacement périlleux à Périgueux « C’est ma quatrième frustration à la tête de l’ASSE, parce que j’ai perdu quatre matchs déjà ».
Personne ne pourra mieux résumer ce qu’il vit et qui lui a fait perdre un peu de son assurance et de son humour, malgré un trait en réponse à une question sur un possible turnover dans les buts. « J’aime bien danser la valse, mais au foot on ne tourne pas ». Pour rester dans le ton, on aurait pu répliquer que tous les entraîneurs valsent un jour, mais le sujet n’était pas celui-ci. Le message était que Paul Bernadoni garderait les filets stéphanois. Lui qui avait été éliminé par une N3, Linas-Montlhéry, en 32eme avec Angers et Thioub, se voyait donc offrir une deuxième chance qui n’avait rien d’un cadeau de son entraîneur « Je ne suis pas là pour faire plaisir ». Cela s’est vérifié. Être le portier d’une lanterne rouge n’est pas une sinécure, y compris devant des amateurs ou pros reconvertis. L’ex-Angevin avait-il conscience de la difficulté de la tâche quand il a reçu l’assurance d’une place de titulaire chez les Verts?
Et dire que la volonté de Dupraz à Bergerac était d’aligner un onze performant !
Pascal Dupraz qui tient les comptes « Paul a gagné un match sur trois » avait-il lancé n’accablera certainement pas son gardien, malgré cette nouvelle défaite. Le mal est ailleurs, il le sait et ne peut que constater, comme nous, que le problème est resté entier tout ce mois de janvier comme chaque hiver. L’attaquant s’est fait attendre alors que c’était la priorité et la colère de Timothée Kolodziejczak résumait tout, à la fin du match dimanche « On a la possession, mais on n'est pas dangereux. Dans les duels, on a manqué de répondant… Lorsqu’on ne fait pas les bons gestes devant la surface, on ne marque pas et ça fait chier ».
Ses détracteurs objectiveront que la défense a aussi péché, mais sans doute verront-ils une lueur d’espoir dans l’arrivée d’Elia Mangala et son discours « On va se sauver. C’est un club et une ville qui respirent le foot. Ce ne sera pas facile, chaque match sera une bataille mais on a tout pour ». C’est ce qu’on appelle de la confiance, ce que Dupraz recherchait en alignant la meilleure équipe possible devant Bergerac « A partir du moment où les joueurs sont aptes, ma quête, c’est de trouver un onze performant… Quelle que soit la compétition, quel que soit l’adversaire, plus tu gagnes, plus tu en emmagasines ».
La déception est donc à la hauteur de l’espoir, comme après un derby galvaudé aux yeux de «certains supporters ». Le successeur de Claude Puel dit comprendre « Leur sentiment de honte », et prend l’échec pour lui « Il faut peu parler, dire comme toujours que les défaites sont du ressort de l’entraîneur. Je n’ai pas trouvé la formule pour que l’équipe l’emporte ». Une façon de détourner la fronde qui, après le manager précédent et les actionnaires, risque de viser les joueurs. Mais les mots ne suffiront pas. Il faudra des buts, des points, des renforts opérationnels. On se souvient trop de Modeste et Retsos. Mangala est conscient de ces réticences et lui, qui a préféré ne pas jouer en coupe se veut rassurant « Le but n’est pas de revenir un match et de se péter. Je veux aller jusqu’à la fin de saison ». Espérons, et qu’il en sera de même pour tous.
Didier BIGARD