Didier Bigard revient sur le piètre match nul de l’ASSE à Auxerre (1-1) en évoquant aussi le Mercato et la lenteur des dirigeants stéphanois pour renforcer leur équipe. Il souligne certains manques actuels, notamment au niveau de la créativité…
C’est peut-être un trait de caractère des Norvégiens. Si oui, Eirik Horneland a eu bien raison de ne pas laisser cette qualité à la frontière. Olivier Dall’Oglio ayant été débarqué, entre autres raisons, parce qu’il devenait trop pressant au goût de ses dirigeants, dès qu’on abordait avec lui la nécessité et l’urgence évidentes de recruter, son successeur a pris le poste avec des pincettes. D’emblée il a affirmé bien haut sa volonté de travailler avec le groupe de joueurs qu’il avait sous la main. Mieux, il reprenait le refrain préféré de la nouvelle vague de propriétaires de clubs, plus investisseurs que passionnés irrationnels, même si on veut bien croire que le cœur de Larry Tanenbaum bat comme celui d’un sportif. L’idée directrice, qu’elle mène au trading joueurs ou aux résultats est de faire progresser l’effectif, de le valoriser sur le terrain ou dans les actifs. Le coach des Verts s’y est donc rapidement engagé et pas seulement en salle d’interview. Chacun a pu constater une évolution du collectif, un football plus enthousiaste, plus de courses, de solutions, de solidarité, de combativité. Mais pas de qualité. Au point qu’on confrère avait questionné Horneland sur un désespoir qu’on comprendrait de voir tant d’efforts réduits à néant par des erreurs individuelles, des fautes techniques, maladresses et relances aléatoires. A défaut d’abonder, le technicien avait usé d’un discours qu’il a vite appris à lisser, mais avait quand même annoncé quelques ajustements avant la fin du mercato. Il fallait juste être patient et attendre la dernière ligne droite, comme toujours dans ce marché qui peut vite devenir de dupes. La seule exception à la règle, côté stéphanois, avait été sonnée par Jean-Louis Gasset, plus pressé et moins diplomate quand nécessité fait loi.
Il faudra aussi des passeurs
Après le nul concédé devant Nantes, nous avions titré « Encore du temps et points perdus »: les tergiversations autour du retour d’Irvin Cardona et la prestation fournie à Auxerre auraient pu valoir un bis repetita plein d’ironie. Le point ramené atténue la critique et entretient l’espoir de ceux qui nous interpellent d’un « C’est quand même mieux avec Horneland ». Dans l’esprit, oui, dans les statistiques pas trop. Davitashvilli n’a frappé qu’une fois au but (cadré), Stassin et Boakye deux fois (un tir cadré chacun). C’est maigre, même en y ajoutant les deux tentatives d’Amogou (à côté) et celle d’Ekwah (hors cadre). Si on ajoute un lourd déficit dans les duels, de tous, hors Appiah (50%), Amogou (55%) et surtout Nadé (88% de duels gagnés), tous les autres oscillent entre 21% (Davitashvilli) et 44% (Batubinsika). Ceci explique en partie une domination souvent stérile malgré une nette possession du ballon (63%), avec en prime ou plutôt déficit, seulement deux centres aboutis (par Davitashvilli) et des dribbles réussis uniquement pour Appiah (1 sur 3) et Davitashvilli encore (2 sur 4). Tout est question de confiance sans doute, mais pas seulement. Il faut un brin de talent. Cardona peut en apporter mais son efficacité dépendra aussi des passeurs, oiseaux rares, dénichés…
Didier Bigard