Le gouvernement fait-il preuve de lâcheté en tapant sur le FC Nantes et l’ASSE ?

Le ministère de l’Intérieur a l’intention de dissoudre cinq groupes ultras, dont un du FC Nantes et deux de l’ASSE, alors qu’il en ciblait neuf au départ, parmi lesquels un de l’OM. Fait-il preuve de lâcheté dans ce dossier ? Nos journalistes Laurent Hess et Raphaël Nouet en débattent.

Hier soir, Le Parisien a révélé que le ministère de l’Intérieur avait décidé de dissoudre cinq associations de supporters, la Brigade Loire du FC Nantes, les Green Angels et les Magic Fans à Saint-Etienne, ainsi qu’une à Strasbourg et une autre au Paris FC. Rien de définitif car les groupes ultras auront l’occasion de plaider leur cause devant une commission. Mais on peut se demander pourquoi le gouvernement, qui avait ciblé neuf groupes au départ, dont les Fanatics de l’OM, a revu ce nombre à la baisse et décidé de « taper » sur des clubs qui ne comptent plus parmi les poids lourds du championnat…

C’est mérité mais…

« Je ne vais pas mentir, je n’ai aucune idée de ce qui est reproché à la Légion X du Paris FC. Je ne savais même pas que ce groupe existait… Mais les Offenders de Strasbourg sont un groupuscule d’extrême droit qui mérite assurément d’être dissous. Pour les ultras nantais et stéphanois, par contre… Je vais me faire un peu l’avocat du diable mais il y a tout de même des raisons claires pour ces trois groupes. Si c’est la tentative d’envahissement du terrain lors de Nantes-Le Havre (0-2) à l’automne dernier qui a fait déborder le vase, la Brigade Loire est surtout dans le viseur des autorités suite à la mort d’un supporter en décembre 2023 suite à une attaque contre des Niçois. Les ultras nantais avaient tendu une embuscade à des fans des Aiglons et un chauffeur VTC avait poignardé un des assaillants. Des faits gravissimes. Comme ceux ayant suivi la relégation des Verts en 2022, qui avait vu les ultras envahir la pelouse et attaquer la tribune d’honneur à coups de fumigènes. Les dirigeants étaient visés mais des femmes et des enfants avaient été terrifiés par ces agissements.

Il y a donc une vraie raison à vouloir dissoudre ces groupes. Mais pourquoi eux et pas les Red Tigers lensois et les DVE lillois qui s’étaient battus à la mi-temps d’un derby il y a trois ans ? Ou le CU84 et les South Winners qui en ont fait de même cette saison lors d’un match au Vélodrome ? Et les Niçois et leurs banderoles ouvertement racistes à l’encontre des Marseillais ? Où placer le curseur dans la violence, entre ce qui est acceptable et ce qui n’est pas acceptable ? Je trouve que le gouvernement, une fois encore, prend le problème des supporters à l’envers. Plutôt que le dialogue, il choisit la répression. Avec ces dissolutions, il permettrait à des casseurs de prendre des places n’importe où ailleurs et de continuer à faire n’importe quoi alors qu’ils sont relativement encadrés dans un groupe ultra.

Enfin, je regrette que ce gouvernement, qui s’est planté lamentablement lors de la finale de la Champions League 2022 et a menti honteusement ensuite pour se couvrir, continue de se mêler des affaires du football alors qu’il a largement démontré qu’il n’y comprenait rien… »

Raphaël NOUET

Des dissolutions arbitraires

« L’annonce de la dissolution des groupes ultras ne m’a pas étonné, j’étais au courant depuis quelque temps de la menace qui planait sur les Magic Fans, les Green Angels et la Tribune Loire. En tant que correspondant à Saint-Etienne, je veux bien croire que les « MF » et les « GA » aient un certain passif, mais il me semble que ces derniers temps, mis à part quelques craquages de fumigènes (surtout dans le kop sud), les deux groupes ultras n’ont pas commis d’exactions justifiant une dissolution.

Non, ce que je ne comprends pas, c’est ça : pourquoi eux plutôt que d’autres, du côté de Paris, de Nice ou de Lyon, voire de Marseille ? N’y a-t-il pas eu de gros soucis de violences, de racisme, de la part des ultras de ces (gros) clubs-là ? Ils seraient donc plus irréprochables que les Stéphanois, les Nantais et les Strasbourgeois ? Le gouvernement tape sur les uns, pas sur les autres. J’aimerais comprendre les raisons, cet arbitrage. J’espère qu’on aura les explications. Les ultras du Paris FC sanctionnés. OK. Ils sont combien ? Bref, je crois qu’à ce niveau aussi, il y a des choses qui nous dépassent… »

Laurent HESS