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Le débat de la rédaction : faut-il instaurer la vidéo ?

Trois buts monégasques, dont deux (au moins) entachés d’un hors-jeu ; la rencontre de la 29e journée de Ligue 1 entre l’OL et Monaco (2-3) dimanche a réveillé les partisans de l’assistance vidéo, tout heureux de disposer d’un nouvel argument en leur faveur.

Trois buts monégasques, dont deux (au moins) entachés d’un hors-jeu ; la rencontre de la 29e journée de Ligue 1 entre l’OL et Monaco (2-3) dimanche a réveillé les partisans de l’assistance vidéo, tout heureux de disposer d’un nouvel argument en leur faveur. Deux de nos rédacteurs donnent leur avis sur le sujet.

La vidéo est nécessaire

Oui, l'erreur est humaine. Oui, introduire la vidéo pour la supprimer – ou du moins l'atténuer – contredirait ce qui est l'essence màªme du football. Un sport populaire. Un sport de masse. Un sport qui ne nécessite pas de moyens financiers extraordinaires. L'utilisation de la vidéo revient à constituer une élite. Un clivage. Les professionnels d'un côté, les footballeurs du dimanche de l'autre. Pourtant, il s'agit d'une évolution nécessaire.

« Cela peut chiffrer à 20 M€ pour des arbitres qui ne savent pas », pestait Jean-Michel Aulas lors d'un match à Valenciennes, il y a quelques saisons, qui aurait pu priver son équipe de la lucrative Ligue des Champions. L'arbitre peut se tromper mais lui refuser délibérément l'aide de caméras et de ralentis peut avoir des conséquences désastreuses sur l'économie des clubs, voir màªme menacer des emplois au sein du petit personnel, les premiers touchés par les mesures prises au sein des clubs. Une équipe qui rate l'Europe ou qui descend pour un petit point perdu à cause d'un but hors-jeu, d'un but accordé à l'adversaire alors que le ballon n'a pas franchi la ligne, ce sont des millions d'euros qui ne rentrent pas dans les caisses.

Des conséquences trop lourdes pour àªtre prises à la légère

Il serait bien vain de lancer l'empirique poncif : « Oui, mais les erreurs s'équilibrent sur une saison”¦ » Ce n'est pas tout le temps vrai. L'excellent site arbitragevidéo.fr le prouve chaque semaine en recensant les boulettes qui influent sur la Ligue 1. En retirant les buts hors-jeux et les penaltys oubliés, on se rend compte que le classement est chamboulé. Après les 28 premières journées, Paris compterait 15 points d'avance sur Monaco, l'ASSE serait troisième à la place de Lille, l'OL aurait un boulevard pour la cinquième place. Et que dire de la course au maintien où les erreurs peuvent conduire les clubs jusqu'au dépôt de bilan. Sochaux (19e avec 22 points) serait revenu à égalité avec le premier relégable nià§ois (12e avec 34 points), Evian aurait beaucoup plus d'air qu'aujourd'hui et Nantes, lésé de six points depuis le début de saison, serait quasiment sauvé.

Alors oui, la « boulette » du corps arbitral a toujours existé. Mais ce n'est pas au nom d'une quelconque tradition qu'il faut s'interdire d'évoluer. En plusieurs décennies, les budgets des clubs ont explosé et, avec eux, les enjeux financiers sous-jacents n'ont cessé de croitre. Màªme s'il faut le manier avec précaution, en ne l'utilisant pas à tort et à travers pour ne pas casser le rythme d'un match, l'outil vidéo est nécessaire. Ne serait que pour les actions litigieuses sur les buts : ballons qui franchissent ou pas la ligne, hors-jeux plus ou moins flagrants”¦ En somme, il s'agit de s'inspirer du rugby, qui ne fait appel aux écrans que pour entériner ou non les essais.

Alexandre CORBOZ

La vidéo est inapplicable

Sur le papier, se référer aux ralentis pour résoudre une situation litigieuse paraà®t évident. Mais dans les faits, un tel procédé est inapplicable.

Prenons un exemple : un joueur est lancé en profondeur sans que l’arbitre ait pu déterminer s’il était hors-jeu. Balayons d’emblée cette possibilité consistant a stopper le jeu aussitôt pour consulter les images. On ne va quand màªme pas demander à l’attaquant de s’arràªter, puis de reprendre sa course vers les buts… La seule solution consisterait donc à le laisser terminer son action avant d’avoir recours aux images.

Hypothèse numéro 1 : le but est marqué.

Le temps de consulter la vidéo, on priverait le football de ce qu’il offre de meilleur : cet instant magique où le ballon franchit la ligne, où le supporter extatique hurle son bonheur. S’y substitueraient plusieurs minutes de tergiversations avant une célébration frelatée. On peut l’accepter en rugby, pas en football où les arràªts de jeu sont moins courants et l’importance d’un but supérieure à celle d’un essai (que pénalités et drops peuvent compenser).

Et encore, on ne parle-là que du cas où le but serait valable. Car s’il s’avère que l’attaquant était en position illicite, bonjour la fausse-joie pour les fans. On pourrait ainsi avoir droit, lors de chaque match, à trois ou quatre buts « pour du beurre », refusés après plusieurs minutes de palabres. Une comédie dont les supporters finiraient par se lasser…

Hypothèse numéro 2 : le gardien repousse le ballon.

Imaginons maintenant que l’attaquant rate son duel et que le ballon reste dans l’aire de jeu. Les arbitres auraient tout intéràªt à laisser l’action se poursuivre : on ne va pas aller vérifier la validité d’un but qui n’a pas été marqué. Sauf que dès lors, le jeu est faussé : qui sait si l’équipe en position d’attaque ne va pas récupérer la balle une minute plus tard, construire une nouvelle offensive et donc profiter indirectement de ce qui aurait dû àªtre un coup franc contre elle ?

Cette question de la remise en jeu du ballon se pose également dans le cas d’une frappe lointaine ayant rebondi sur (ou derrière) la ligne de but. L’arbitre arràªte le jeu, le but est valable, parfait. Mais s’il ne l’est pas, à qui rendre la balle ? Rien ne dit qu’un attaquant ne l’aurait pas récupérée dans la foulée pour tenter à nouveau sa chance, ou que la défense n’aurait pas marqué en contre-attaque. À moins de demander aux joueurs de garder leur position, immobiles, le temps de visionner les images, ce problème reste insoluble…

Bref, l’utilisation du replay est impossible. Et c’est sans doute mieux ainsi : à l’usure, supporters et analystes comprendront peut-àªtre qu’il y a plus grave qu’un but refusé ou un hors-jeu non sifflé…

Julien DEMETS

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