« Pourquoi les deux présidents sont-ils aux abonnés absents? La question a fait le tour des plateaux et des réseaux avant et plus encore après le derby. Une vielle habitude que Bernard Caà¯azzo avait regrettée en relevant que dès que le vent tourne mal sur le terrain, public et observateurs pointent le doigt vers les patrons, accusant de tous les maux de l'équipe cette dualité stéphanoise. Le reste du temps on les oublie, estimait-il, ce qui est toutefois difficile tant, à tour de rôle, les deux frères savent faire entendre leur voix. L'un dans le Forez, l'autre dans la capitale. L'un à l'occasion de rencontres avec des clubs de supporters, égaillées de tapes dans le dos ou tirages d'oreille amicaux, l'autre à coup de longues tirades pour journalistes, assorties de mails explicatifs ou sms. Enfin, à§a, c'était avant, parce qu'il est vrai que c'est silence radio et rupture d'images depuis des mois, la nomination d'un directeur général et d'un manager qui l'est encore plus (général).
Bernard Caà¯azzo et Roland Romeyer n'ont pas la bonne boussole
Les débats ont donc fleuri sur la nécessité pour les deux actionnaires de l’ASSE de faire entendre leur voix et faire trembler le vestiaire. On comprend cette attente face à une plongée dans les profondeurs, mais ni Roland Romeyer, ni Bernard Caà¯azzo ne nous semblent avoir la bonne boussole pour annoncer un cap qui ne varierait plus au fil des marées. Si on attendait un soutien de ces armateurs, c'était au mercato avec l'arrivée d'un buteur, un joueur capable de tirer l'équipage vers le haut quand les courants sont contraires.
On l'a déjà écrit, Galtier, Garcia, Gasset et Printant ont tous espéré cette hirondelle qui indique que la terre est proche. Aujourd'hui, elle est loin d'àªtre promise et l'ombre de l'à®le qu'on distingue parfois à travers les flots tourmentés est celle de la L2 ou d'un barrage. Qu'elle voisine avec celle de la coupe sous le soleil ne fait qu'accentuer le mal de mer. Parce qu'on a vu face à Rennes que ce bateau vert aurait pu connaà®tre une traversée plus tranquille avec pour passagers un public qui n'est pas le dernier à souquer pour épauler l'équipage, à condition que ce dernier rame du bon côté.
On a donné aux recrues de Gasset un faux statut de mercenaires
La seule vérité en football, la vraie dynamique, est celle de la pelouse et des résultats, ce que Xavier Thuillot sait, màªme si son analyse sur la désaffection du stade n'a pas convaincu. « Le prix est une mesure populaire, mais en màªme temps, on dévalorise le produit et le spectacle » a-t-il expliqué dans Le Progrès. « Il y a toute une catégorie de gens qui voudraient payer plus s'ils avaient plus de services… Ce peut àªtre un problème pour certains d'entendre des insultes pendant tout un match».
Si sur ce dernier point on admet que beaucoup préfèrent entonner des chants à la gloire de leur équipe que contre la Ligue ou le voisin, Saint- Etienne ce n'est ni Paris ni Lyon. Et il y a d'autres facteurs à cette baisse de spectateurs. On pense aux huis clos qui spolient les abonnés, aux programmations le dimanche soir qui éloignent les supporters, aux erreurs qui ont déplacé des habitués des Snella et Paret supérieurs.
Et bien sûr il y a la pauvreté du spectacle, son manque d'intensité au delà de la qualité technique de l'équipe, l'absence de charisme supposé des joueurs, un sentiment d'éloignement avec les valeurs populaires de la ville. Cette impression vient du statut donné aux recrues de Gasset, soldats ou mercenaires (ce qu'ils ne sont pas dans l'âme), ayant pour mission de sauver le club. Les larmes de Boudebouz, autant que son but face à Rennes, ont entamé cette fausse image. La qualification pour la finale de la coupe, suivie d'un match courageux face à Bordeaux a renoué le lien. Encore quelques résultats et on oubliera le silence des présidents. On le souhaitera peut-àªtre màªme. »